Rome, ville éternelle, son Histoire aussi dense qu'un gnocchi de supermarché et aussi riche qu'un tiramisu, ses vieilles pierres, sa brochette infinie d'églises... Dire que j'ai pris plaisir à déambuler dans les rues de ce musée à ciel ouvert serait un euphémisme. Découvrir Rome, ou même la redécouvrir, est un plaisir immense. Malgré tout, ce ne sont pas quelques coiffes papales, une louve de bronze ou la chaleur d'une arène encore imbibée du sang passé qui peuvent nourrir les chairs épaisses du bon vivant que je puis être...
Ce périple romain fut donc aussi le théâtre d'une quête aussi historique que calorique, celle de la quintessence gastronomique d'une vie : la carbonara.
Oui, j'ai bien dit la carbonara, vous n'avez pas mal entendu. Non, parce que ces derniers temps on avait plutôt l'impression que l'anthologie de la cuisine italienne se résumait à un peu de pâte à tartiner sur une tranche de pain. Loin de moi l'idée de totalement dénigrer ce fameux Nutella, lui qui enduisit une partie des goûters de ma jeunesse, mais de la à en faire un emblème national... Sans vouloir faire injure à la noisette, un simple plat de pâte bien fichu possède un bagou bien supérieur à toutes les tartines grassouillettes que vous voudrez bien me servir.
Mille excuses pour la polémique sur le #Nutella. D'accord pour mettre en valeur les progrès.— Ségolène Royal (@RoyalSegolene) 17 Juin 2015
Et puis parler de progrès quand on aborde un pot d'huile de palme et de sucre dans lequel baignent quelques noisettes et un peu de cacao...
Bref, revenons à nos pâtes à la carbonara.
Loin d'être un érudit de la chose, je commençais donc mes recherches via le réseau d'illuminés du couteau et de la fourchette sillonnant le web, ce qui me mena notamment ici. Faire est une chose, mais avoir un modèle est aussi indispensable qu'appréciable à l’heure d'envisager une mise en pratique ...
Les différentes discussions, échanges d'adresses, auront accouché d'une recommandation claire : nous faire passer la porte de chez Roscioli, institution romaine dont le nom circule aussi évidemment chez les touristes, frange non négligeable de la population romaine dont nous nous revendiquions lors de ce séjour. Il est d'ailleurs parfois agréable de succomber quelque peu aux facilités du vacancier maladroit. Se laisser glisser dans le flot de quelques couillonades possède un certain charme, vous en conviendrez ou pas, mais boire un Spritz au coucher du soleil, sur la terrasse d'un café de la Piazza Farnese, ou sacrifier à un simple sandwich hors de prix pour éviter la syncope d'un soleil maltraitant une attente internationale face aux arcades du Colisée, peut s'avérer aussi jouissif que d'aller pisser contre un arbre après trois heures de route.
Bref, même si nous n'avons pas osé emprunter un Vespa pour nous frayer un passage dans la circulation très particulière de la capitale italienne, la carte postale était belle, et malgré tout, nous n'avons pas cédé à la folie surréaliste des cannes à selfie, nouvel outil indispensable pour qui veut réussir son séjour.
Bref, même si nous n'avons pas osé emprunter un Vespa pour nous frayer un passage dans la circulation très particulière de la capitale italienne, la carte postale était belle, et malgré tout, nous n'avons pas cédé à la folie surréaliste des cannes à selfie, nouvel outil indispensable pour qui veut réussir son séjour.
Mais retournons chez Roscioli. À 20 heures, nous franchissons le seuil de cet établissement un peu particulier, car le restaurant fait aussi office d'épicerie fine et de cave à vin. Aussi, il peut-être un tantinet désagréable, à l'heure de s'installer, de se voir proposer une table placée contre une vitrine réfrigérée pour manger un repas qui, malgré la qualité des produits, sera loin d'être donné, alors que des quidams viennent chercher quelques tranches de jambons par dessus votre épaule... Surtout que la salle, découpée en trois parties bien distinctes, possédait bien des charmes en d'autres endroits : un sous-sol bruyant et agréable dans lequel festoyaient les italiens, une grande salle où les étrangers au portefeuille légèrement plus épais que le notre éclusait des Rayas et des Romanée Conti et ce couloir pour touristes déshérités, visiblement mis de côté, et sûrement moins regardant sur le service.
Ce n'était peut-être que la vérité de ce soir là, toujours est-il que malgré une réservation plusieurs jours à l'avance, nous voilà accolé à un mur de bouteilles, certes de qualité, mais dans le passage régulier des clients de l'épicerie. On aura connu meilleure installation...
Ce n'était peut-être que la vérité de ce soir là, toujours est-il que malgré une réservation plusieurs jours à l'avance, nous voilà accolé à un mur de bouteilles, certes de qualité, mais dans le passage régulier des clients de l'épicerie. On aura connu meilleure installation...
Heureusement, dans l'assiette, le recentrage d'attention fut immédiat. Après quelques tranches d'un très gouteux jambon et une rafraichissante boule de mozzarella à vous faire regretter vos achats français de ce que l'on ose encore appeler mozzarella di buffala, voilà qu'approche enfin notre assiette de pasta a la carbonara*.
Une assiette de spaghettoni crémeux goutant à un repos de courte durée dans leur lit d'œufs battus et de pecorino romano, qu'un voile de poivre vif et odorant vient remuer pour le plus grand plaisir de nos papilles. En quête d'un plaisir toujours plus intense, la fourchette pioche, plonge, explore et ne peut éviter les quelques morceaux de Guanciale croustillants sous la dent. Un bonheur simple comme une cuillère de Nutella dirait aujourd'hui Ségolène...
Le progrès est une chose, mais qu'il vienne se substituer au respect, avec ses airs de nouveau caïd de la cour de récré ne le servira qu'un temps. Du moins je l'espère. Car quand le produit, simple et généreux s'empare en toute simplicité de chaque coin d'une assiette, il n'est nullement besoin d'une déclaration d'intention ministérielle pour que chacun comprenne où se trouve l'église, ni la place du village.
Sur ce, je file me perfectionner encore un peu, car l'interprétation française des pâtes à la carbonara n'est pas non plus aussi simple qu'on pourrait le croire. Mais pour sûr, comme vous dès à présent, ni crème, ni lardons caoutchouteux et encore moins d'oignons, ne viendront se frotter contre les flans affutés de mes quelques paquets de pâtes soigneusement rangées au cellier. Gardons ça pour les lendemains de fêtes, où seul un gras bien primaire peut venir panser un estomac encore chahuté. Nous appellerons ça différemment, et nous garderons ces joues de cochon et quelques œufs fermiers pour les grandes occasions, celles qui derrière leur apparente simplicité cachent bien souvent leurs plus grands secrets...
* Clairement les meilleures pâtes à la carbonara que nous ayons pu goûter durant notre périple. Car évidemment, nous ne nous sommes pas limité à une simple expérience du genre...
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BREAKING NEWS - On arrête plus le progrès, comme dirait notre Royal ministre... Pour preuve, voici le nouveau fleuron de la gastronomie internationale, ou du moins, ce qui pourrait bien le devenir. (Si vous le voulez bien, on parlera des Oreo une autre fois. À chaque jour suffit sa peine.)